Concours ENLEVEMENT AU COSTA RICA

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Concours ENLEVEMENT AU COSTA RICA

Voici le résultat de mon concours « Enlèvement au Costa Rica »

Pour ceux qui ne sont pas au courant de ce concours, il s’agissait de deviner l’incohérence qui s’était glissée dans le premier chapitre de mon livre « Enlèvement au Costa Rica ».

« Un groupe de mariachis chantait pour les clients et après avoir mangé son premier Gallo pinto, plat typique costaricien composé de riz et de haricots, elle s’était fait plaisir en s’offrant un mojito qu’elle avait dégusté sur la plage en regardant le coucher du soleil. »

Maintenant que je pointe le paragraphe, je suis certain que ceux, qui connaissent un tant soit peu le Costa Rica, auront deviné l’incohérence, et il s’agit du Gallo Pinto, qui est un plat qu’on sert plutôt le matin au cours du petit déjeuner.

Bravo à Virginie qui a été la première à m’envoyer la bonne réponse et la plus proche à la question subsidiaire concernant le nombre de participants. Elle gagne mon dernier roman en format papier et dédicacé « Le mystère du château de Poilvache », ainsi qu’un dîner pour deux dans un bon restaurant.

Bravo et merci aux autres participants. Si vous avez participé et que vous désirez un de mes romans, je me ferai un plaisir de vous faire parvenir un de ceux-ci par voie électronique.  

À bientôt pour un nouveau concours.

Diego Rica

CONCOURS clôturé

Dans mon livre  « Enlèvement au Costa Rica », je parle des coutumes du Costa Rica et un de mes lecteurs me fait remarquer que je me suis trompé dans le premier chapitre en parlant d’une chose, de quoi s’agit-il ?

Je mets une partie de mon premier chapitre ci-dessous afin de permettre à tout le monde de participer à ce petit concours. Si vous avez trouvé la bonne réponse, veuillez me donner votre réponse en MP en mentionnant également votre estimation du nombre de participants. Je contacterai le gagnant par MP 😊. Pas de réponse sur cette publication svp, merci.

Livre gratuit si vous avez l’abonnement kindle

Résultat du concours le 01 juillet 2021.

Diego Rica

 

                            CHAPITRE I 

                            Gabrielle est étendue, inconsciente face contre terre sur la plage. Une vague déferle sur ses pieds et se retire sans avoir beaucoup d’effets sur elle.  Néanmoins, elle tourne légèrement sa tête qui reposait sur le sable. Une deuxième, plus hardie, grimpe sur son corps et finit par mourir sur son crâne. Elle se redresse et tousse violemment, faisant ressortir l’eau qu’elle vient d’ingurgiter malgré elle.

Elle se retourne face au ciel lumineux, parsemé de nuages blancs. Elle inspecte les alentours. Seuls, quelques crabes rouges qui étaient sortis de leurs cachettes sont présents et l’épient prudemment. Elle ramène sa main droite sur son visage pour tenter d’enlever le sable qui lui colle à la peau, remonte la mèche de cheveux qui lui gêne la vue et découvre qu’elle a une bosse sur le front.

Comment a-t-elle pu se faire ceci et surtout que fait-elle sur cette plage ?

         Elle se redresse difficilement. Ses abdominaux la font souffrir et elle ne peut s’empêcher de manifester un cri de douleur. Ses admirateurs, effrayés par le son bruyant, rentrent rapidement dans leurs repères. Le ressac fouette à nouveau ses jambes et l’eau éclabousse son visage.

Elle s’essuie de la main et à quatre pattes, parcourt quelques mètres afin de se mettre à l’abri de cette eau salée qui lui brûle la peau. Assise, trempée et hagarde, elle essaye de comprendre ce qui lui arrive, mais rien ne lui vient à l’esprit. Elle panique. Serait-elle devenue amnésique ?

La plage est déserte, et la mer, face à elle, est exempte de la moindre voile. Il n’y a aucune coquille de noix qui aurait pu la rassurer. Elle a beau fouiller sa mémoire, elle ne sait toujours pas comment elle a abouti ici !

Au loin, le soleil embrase dangereusement les flots et elle réalise soudainement que dans moins d’une demi-heure, l’obscurité fera place au ciel bleuté. La lumière orange commence déjà à lécher une partie de l’horizon. Il n’y a pas de temps à perdre, se dit-elle. Elle essayera de comprendre plus tard comment elle a atterri sur cette plage déserte.

Malgré son front qui cogne et son ventre qui la fait souffrir, elle se lève et se dirige vers les cocotiers, qui sont alignés de façon ordonnée sur le bord de la plage. Après avoir fait péniblement une dizaine de pas, elle s’appuie sur un des troncs et se rappelle qu’il est imprudent de rester dessous. Il ne faudrait pas qu’elle se ramasse une noix de coco sur la figure. Une bosse lui suffit, pense-t-elle en souriant légèrement. Malgré le danger, elle s’appuie sur l’arbre et inspecte les lieux à la recherche d’un signe de vie.

Une lumière rose envahit le ciel. Le soleil a maintenant disparu derrière les flots et il ne reste que quelques minutes à Gabrielle pour trouver un refuge pour la nuit, mais elle ne voit rien. Il n’y a qu’une végétation luxuriante devant elle et pas la moindre activité humaine.

Dans la pénombre de la jungle, elle pense tout de même apercevoir un toit en tôle rouge sombre. Elle frotte les yeux et focalise son attention afin de découvrir si elle n’est pas victime d’une hallucination.  

         — Non, c’est bien une maison. C’est une maison, hein, dit-elle à voix haute pour se convaincre qu’elle ne va pas passer la nuit, trempée et épiée par une bande de crabes avec lesquels elle n’a pas envie de faire plus ample connaissance.

         Plus elle se rapproche, plus l’image devient nette. La bâtisse est bien là, devant elle, à cinq cents mètres, cachée en partie par une végétation exubérante. Il ne faut pas qu’elle traîne, car l’astre de la nuit prend possession des lieux permettant ainsi aux animaux de sortir de leur tanière afin de chasser leurs proies.

Elle aboutit à un sentier de pierre blanche mangé en grande partie par les herbes et la mousse. À une vingtaine de mètres, la maison, ou plutôt ce qu’il en reste, semble inhabitée depuis de longues années. Gabrielle pense que cela devait être une belle bâtisse par le passé. Une planche en bois peinte, accrochée au-dessus du porche indique le nom de l’établissement dans une couleur rose bonbon : « Hostel Deperdido ». Hôtel perdu, traduit-elle en avançant vers les quelques marches qui amènent à une terrasse vermoulue aux barreaux joliment sculptés. Les deux portes d’entrée sont légèrement entrouvertes et malgré le sentiment qu’il ne peut y avoir personne dans cette habitation, Gabrielle appelle une hypothétique personne.

         — Il y a quelqu’un, dit-elle en poussant une des deux portes qui émet un grincement.

         Personne ne lui répond et elle rentre prudemment dans le couloir sombre lorsqu’elle perçoit un bruit. Quelqu’un semble crier : « Hého », entend-elle à plusieurs reprises. Le long du mur, un gecko, petit lézard des maisons dans les pays tropicaux, lui souhaite la bienvenue, mais il est plus apeuré qu’elle et il vient de prendre la fuite pour disparaître sous une latte du plafond. Une série de portes s’alignent dans ce hall et une lueur artificielle provient de la première pièce sur sa droite.

Il y a quelqu’un, répète-t-elle, tout en s’avançant à pas de loup vers la source de la lumière.

Elle tremble et malgré la peur qui s’empare d’elle, elle pousse du bout des doigts le battant en contreplaqué brun. L’endroit est totalement vide à l’exception d’une table ronde de mauvaise qualité sur laquelle se trouve un bougeoir en bois blanc. La flamme lèche les dernières parties de cire en virevoltant, telle une danseuse, autour de la mèche. La voilà à moitié rassurée. S’il y a une bougie allumée, cela signifie que quelqu’un habite cette maison délabrée et qu’il pourra lui venir en aide, pense-t-elle immédiatement. Cela la réconforte, mais ce moment est de courte durée et s’évanouit lorsqu’elle aperçoit, sur la table, un papier déposé et punaisé sur lequel elle découvre son prénom écrit en grosses lettres rouges. Une sueur de nervosité inonde d’un coup Gabrielle. Une tonne de questions se bousculent dans sa tête. S’agit-il d’une plaisanterie ? Elle la trouverait de mauvais goût ! Non, personne ne pourrait lui faire un coup pareil. Après avoir vérifié d’un dernier regard aux alentours que personne ne se cache, c’est avec une main hésitante qu’elle retire la missive prisonnière et l’ouvre :

Vous êtes le numéro 1.

Bienvenue sur l’île de l’oubli.

  • Il y a quelqu’un, ne peut-elle s’empêcher de répéter une fois de plus avec la voix tremblante. Elle tourne la tête nerveusement dans tous les sens, inspectant rapidement les quatre coins de la pièce. Est-ce que ce papier s’adresse à elle ? Bien sûr puisque son nom y est inscrit ! Mais qui lui joue ce mauvais tour ? Prise de panique, elle crie à nouveau : je sais que vous êtes là, allez, c’est bon, c’est fini cette plaisanterie de merde, dit-elle en espérant enfin recevoir une réponse à ses appels, mais le silence du crépuscule est son seul écho !     

         Sur le mur, à côté d’elle, il y a un cadre en bois de piètre qualité orné d’une peinture représentant un ara rouge en train de décortiquer une amande. En face d’elle, il y a une tapisserie décorée à la gloire de la chasse à courre : le cerf au centre, encerclé de chiens, dont un qui l’a attrapé à la gorge. Ce dessin est inquiétant, d’autant plus qu’il est totalement en inadéquation avec l’environnement tropical dans lequel elle se trouve. Sur le troisième pan, un grand tableau noir avec quelques craies blanches qui s’étalent sur la latte de bois. Le quatrième mur quant à lui, laisse la place à un trou de la grosseur d’une balle de football. La psychose commence à gagner du terrain dans la tête de Gabrielle qui se rappelle le film « Shining » dans lequel, Jack Nickolson, gardien d’un hôtel désert et hanté, devient fou et poursuit son épouse une hache à la main. Ce décor disparate et inquiétant n’aide pas à la rassurer quant aux intentions de la personne qui l’a amené ici.  

Elle attrape le bougeoir et se dirige vers la deuxième pièce sur la droite. À plusieurs reprises, elle aperçoit des interrupteurs sur les murs, mais aucun ne lui apporte la lumière qu’elle aurait tant espérée. Elle entre dans un endroit qui devait être la salle à manger, à en croire les traces laissées par des tables sur le parquet, anciennement verni, mais usé par le temps. Elle est beaucoup plus grande que la première, mais également dépourvue de meuble à l’exception d’un comptoir en bois massif au fond de la pièce. Elle se dirige directement vers celui-ci, mais contrôle la vitesse de son allure, car la flamme de la bougie joue au yoyo et elle craint de plus en plus de ne pas arriver jusqu’au bar avant qu’elle ne s’éteigne.

Un courant d’air vient de souffler son dernier espoir et la voilà plongée dans le noir à moins d’un mètre du lieu qu’elle tentait d’atteindre. Sa vision s’améliore, mais malgré la présence d’une grande baie vitrée près du bar et un faible rayon de lune qui essaye de se frayer un passage parmi les nuages, elle ne parvient plus à distinguer que des ombres.

Elle ne voit plus grand-chose et à présent il fait nuit noire. Plus moyen de continuer son exploration sans risquer de se blesser. Il n’y a plus qu’une chose à faire, se dit-elle : ôter ses vêtements et ses tennis Nike toujours trempés et se calfeutrer dans un coin pour attendre le lever du soleil. La voilà, en boule, en sous-vêtement, recroquevillée sur elle-même. Elle tremble et s’aide de son souffle pour réchauffer ses membres humides.

Elle tente de se concentrer et de comprendre ce qui lui arrive. Que fait-elle ici ? Que signifie ce message ? Pourquoi l’a-t-on amené jusqu’ici et dans quel but ? Elle est inquiète et scrute les moindres mouvements de lumière. Après de longues minutes à épier chaque son et malgré la peur qui lui tenaille le ventre, la fatigue s’empare d’elle et elle parvient à s’endormir. Des bruits de pattes courent sur le parquet, et à l’extérieur les cris dans la jungle ne cessent de la réveiller en sursaut. Un coléoptère percute son front alors qu’elle s’est assoupie à nouveau, ce qui déclenche, chez elle, un hurlement affolé suivi d’une crise de larmes. Régulièrement, elle entend des moustiques lui tourner autour, sent des insectes se promener sur ses pieds qu’elle expulse avec un coup rapide et violent d’une de ses mains et reprend sa position de fœtus jusqu’à la prochaine attaque.

         Un rayon de lumière pénètre la pièce tandis que Gabrielle ouvre un œil après la nuit horrible qu’elle vient de vivre. Elle découvre près d’elle plusieurs cafards sur le dos qui gigotent encore des pattes par intermittence, afin de se retourner. Elle se lève toute courbaturée et s’étire doucement. Ses vêtements, à côté d’elle, sont toujours humides et elle les étale sur le côté du bar pour qu’ils sèchent plus rapidement. Elle appose ses chaussures contre le mur, léché par les premiers rayons du soleil.

Sur le comptoir, à moins d’un mètre d’elle, se trouve une caisse en carton contenant une série de bougies blanches, ainsi qu’une boîte d’allumettes emballée dans un sachet plastique afin de les protéger de l’humidité ambiante et elle peste.

  • Saloperie, va ! Ne peut-elle s’empêcher de s’exclamer tout haut.

         Cette trouvaille la rassure néanmoins au cas où elle devrait passer une prochaine nuit ici, même si cette perspective relève du cauchemar. En attendant de pouvoir se rhabiller, elle parcourt le reste de la maison en zigzaguant afin de ne pas écraser avec ses pieds nus les cadavres d’insectes qui jonchent le sol en bois.

Au rez-de-chaussée, elle découvre une pièce qui devait servir de lieu d’accueil aux clients de l’hôtel. Un bureau en chêne brun foncé et une chaise trouée et bancale sont les seuls éléments d’ameublement. Un peu plus loin, une cuisine et des étagères en bois contreplaqué, blanc et gonflé par l’humidité qui sont rongées par les insectes. Dans le coin, il y a un meuble en métal, rouillé, qui ne contient qu’un vieux bocal en verre, rempli d’un mélange de poudre blanche infestée par des vers et d’autres carcasses mortes.

Sans doute de la farine pense-t-elle, en continuant à parcourir des yeux les différentes planches d’acier, envahies de poussières et de toiles d’araignées, et désespérément vides de toute nourriture. Il n’y a que quelques ustensiles de cuisine rouillés. Sa bouche est pâteuse. Elle actionne le robinet de l’évier, souhaitant assouvir sa soif, mais après quelques sursauts et un crachat d’eau d’une couleur marron, il reste définitivement inerte. Seul un sifflement passe par ces canalisations qui n’ont sans aucun doute plus été utilisées depuis de nombreuses années.

Elle monte l’escalier prudemment. Certaines planches rouspètent à son passage malgré les cinquante-sept kilos de la jeune femme. Arrivée à la dernière marche, elle se dirige vers la gauche et elle aperçoit une silhouette dans le couloir. Elle prend peur et se blottit derrière le mur, mais subitement elle se rend compte que son attitude est stupide. Depuis hier, elle souhaite comprendre pourquoi elle est ici et lorsqu’elle découvre enfin quelqu’un qui pourrait l’aider, quelqu’un qui pourrait lui donner des réponses à ses interrogations, elle se cache comme une poltronne. Elle est rassurée par son raisonnement et surtout animée d’une furieuse envie de s’enfuir de cet endroit, c’est donc avec détermination et courage qu’elle jette à nouveau un œil afin d’en avoir le cœur net.

Dans le fond du hall, un miroir piqué lui renvoie son reflet. Un mélange de soulagement et de déception l’envahit, mais elle n’est pas du genre à se laisser abattre facilement et continue son exploration. Une série de portes, toutes fermées, s’alignent dans ce long couloir encore bien sombre malgré la présence généreuse du soleil à l’extérieur. Elle visite toutes les chambres et dans l’une d’entre elles, elle découvre une lourde armoire en chêne. Elle s’approche nerveusement et espère y trouver quelques trésors. Elle croit percevoir un léger couinement qui vient de l’intérieur et c’est non sans éprouver une immense peur au ventre qu’elle se décide à ouvrir un des battants de la vieille armoire.

Un opossum, sorte de marsupial d’Amérique Centrale est couché sur un drap qui devait être blanc à une certaine époque. Il se redresse promptement, dresse les poils et crache dans sa direction. Effrayée, elle referme le meuble tandis que l’animal s’enfuit par un trou sur le côté, saute par la fenêtre pour atteindre le sous-toit en tôle et disparaît rapidement dans la jungle.

Elle l’ouvre à nouveau et trouve, cette fois-ci, différents linges de maison qui pourraient éventuellement lui servir dans l’avenir, mais elle ne s’éternise pas, car elle a bien l’intention de ne pas passer la prochaine nuit dans cette maison.

Elle redescend, enfile ses vêtements encore humides et ses chaussures et part explorer les environs. Lorsqu’elle sort par la cuisine, elle aperçoit une machette rouillée sur le pas de la porte. Cela pourra toujours lui venir en aide en cas de mauvaises rencontres, se dit-elle en l’attrapant. Des singes capucins agitent les branches des arbres, ils ne sont pas heureux de découvrir une intruse sur leur domaine. 

Celui qui doit être le chef de la bande fait des aller-retour sur une branche, proche de la maison. Il la fixe et saute régulièrement par des petits bonds afin de faire comprendre à Gabrielle qu’elle n’est pas la bienvenue ici. Dans d’autres circonstances, sa tête blanche, ses yeux noirs et ses grimaces auraient amusé Gabrielle, mais là, elle n’est pas d’humeur.

  • Toi, ça va, si tu me cherches, tu vas me trouver, lui dit-elle en levant la machette dans sa direction.

         Il la fixe une dernière fois en lui montrant ses petites dents pointues, mais semble piger le message et part se réfugier sur une branche plus éloignée.

Un iguane d’une trentaine de centimètres, nonchalant, assiste à la scène avant de s’enfuir lorsqu’il réalise que la jeune femme le regarde attentivement. Il n’a sans doute pas envie de servir de petit-déjeuner.

Gabrielle sent son ventre se retourner, elle a faim. Elle n’a toujours aucun souvenir et se demande encore comment elle a atterri ici.

Elle se rappelle néanmoins son arrivée à San José, capitale du Costa Rica qui est située au centre du pays. La ville n’étant pas plébiscitée pour les visites touristiques, elle avait décidé de dormir la première nuit dans un établissement, près de l’aéroport international Juan Santamaria. Le lendemain, un taxi l’avait emmenée à l’hôtel Best Western à Jaco, première ville de la côte pacifique où l’on trouve de belles plages. Elle avait passé sa première journée à se reposer. Quelques bribes de souvenirs lui revenaient en tête. Elle se remémorait la soirée dans le restaurant de l’hôtel. Un groupe de mariachis chantait pour les clients et après avoir mangé son premier Gallo pinto, plat typique costaricien composé de riz et de haricots, elle s’était fait plaisir en s’offrant un mojito qu’elle avait dégusté sur la plage en regardant le coucher du soleil. Puis, plus rien, le trou noir et son réveil sur cette plage.

         — Tu parles de vacances, je devrais être en route pour le volcan Arenal à l’heure qu’il est et à la place de ça, je me retrouve ici avec Macaque 1 ͤ ʳ, dit-elle en hurlant vers le singe, qui a recommencé sa séance d’intimidation sur une branche un peu plus éloignée, et qui lui sert à présent de défouloir.

         Son ventre vient de se tordre à nouveau. Elle se souvient la rangée de cocotiers.

– Ce serait bien un comble de malchance si je ne dégote pas une noix de coco.         

Sur la plage, il y a en effet des cocos vertes sur le sol. « Pipa fria » se rappelle-t-elle avoir lu dans son guide lorsqu’elle a fait les quatorze heures d’avion pour arriver au Costa Rica. Les Ticos, ainsi que se surnomment les habitants de ce pays, en sont friands et partout des vendeurs proposent cette jeune noix de coco fraîche dont on boit le jus à la paille.

Gabrielle en prend une dans la main et s’interroge sur la manière d’obtenir le liquide précieux qu’elle contient. Comment faire pour la décapiter avec la machette sans se blesser ? Tout à coup, pendant qu’elle réfléchit encore à la façon de procéder, une armée de minuscules fourmis, bien décidées à garder rien que pour elles la chair blanche et légèrement sucrée du fruit, se répand sur la coco. En quelques secondes, sa main est attaquée par les insectes. Elle lâche prise, laisse tomber sa machette et de l’autre main débarrasse les téméraires qui ont déjà planté leurs mandibules dans sa peau afin de lui donner une bonne leçon.

Elle ne se décourage pas et en cherche une autre inhabitée. Lorsqu’elle l’a repérée, elle l’inspecte du bout de la machette, en la faisant rouler. Elle ressent encore les minuscules crocs qui se sont insérés dans sa chair et n’a pas envie de revivre une pareille expérience. Maladroitement, elle frappe la noix, posée sur le sable humide, qui virevolte et se déplace d’un demi-mètre. Elle frappe à nouveau, mais le fruit a parcouru une vingtaine de centimètres ne laissant que deux cicatrices légères et peu profondes. Elle l’attrape et, rageusement, la lance de toutes ses forces sur le tronc du palmier qui se trouve en face d’elle. L’objet, animé d’une furieuse envie de survivre, revient vers elle et passe à quelques centimètres de son visage.

         — Ah, tu veux jouer, dit-elle en regardant la petite boule verte qui semble la narguer.

          Elle la saisit de la main gauche et d’un coup, bien imprudemment exécuté, parvient tout de même à ôter la partie supérieure de la noix qui dévoile son liquide transparent. La substance divine coule dans sa gorge assoiffée. Fière de son succès, elle en repère une autre, l’analyse minutieusement et de plusieurs coups de machette, bien plus assurés, réitère son exploit. Après en avoir bu trois, elle décide qu’il est temps pour elle d’inspecter les alentours et de trouver un endroit civilisé d’où elle pourra prévenir sa sœur, qui doit être folle d’inquiétude.

Sandra lui avait pourtant dit que ce n’était pas une bonne idée de partir seule en vacances, et surtout pas en Amérique Centrale, mais Gabrielle n’avait rien voulu entendre. Ce voyage, elle l’avait réservé sur un coup de tête et si son amoureux ne l’avait pas lâchement larguée quelques semaines plus tôt, tout cela ne serait pas arrivé. Qu’est-ce qu’elle s’en voulait d’avoir été aussi naïve ! Georges était vraiment le mec le plus instable qu’elle eut rencontré et si elle avait mis sa fierté de côté, elle s’en serait rendu compte tout de suite.

         — Comment un gars pourrait-il me laisser tomber ? avait-elle dit présomptueusement à sa sœur qui la mettait en garde.

         En effet, Gabrielle n’était pas le genre de fille qu’on plaquait facilement. Son mètre soixante-cinq, ses cinquante-sept kilos, ses yeux vert bleu en amande, son petit nez élégant et sa belle crinière noire ne laissaient personne indifférent et Georges était le premier goujat qui lui avait fait cet affront. 

         — Quoi, tu me quittes ? Mais tu ne peux pas Georges ! lui avait-elle dit fièrement comme si c’était une évidence pour tout le monde.

         C’était la première fois qu’une pareille mésaventure lui tombait dessus. En général, c’est elle qui larguait et son amour propre en avait pris un coup. De Georges, elle n’aimait que son allure BCBG, sa fausse Rolex et son cabriolet rouge. Elle savait bien qu’il ne serait pas l’homme de sa vie, mais elle s’en fichait. À vingt-cinq ans, elle n’était pas prête à s’engager, mais à tort, elle pensait qu’il était fou d’elle et comptait bien passer du bon temps avec ce mannequin, pourvu de beaux abdominaux sculptés.

         Comme elle n’a pas très envie de s’enfoncer dans la jungle, elle espère pouvoir longer la plage, mais de chaque côté de celle-ci les rochers mangent la mer et les vagues s’abattent bien trop dangereusement pour qu’elle puisse s’y aventurer. Elle n’a plus trop le choix. Munie de sa machette et basket au pied, elle dépasse la maison et s’enfonce dans la forêt de lianes et d’arbustes. Aucun sentier dans les environs.

         — Purée, il doit bien y avoir une route quelque part. Comment auraient-ils fait pour construire cette baraque ? se dit-elle pour s’encourager.

          Après avoir passé une demi-heure à abattre son arme sur le feuillage, elle distingue un ancien chemin. Un sentiment d’allégresse la submerge et elle redouble d’efforts en pensant avoir trouvé la voie qui la mènera dans une zone habitée. Elle décide de prendre sur la gauche, un choix non stratégique, superstitieusement dicté par le simple fait qu’elle est gauchère. Cela lui portera chance, se dit-elle.

Elle vient de marcher une heure et le son des vagues a totalement disparu ne laissant la place qu’à des bruissements de feuilles, aux cris des oiseaux et aux grésillements des insectes. Elle s’arrête subitement et écoute attentivement. Le bruit de l’eau qui ruisselle semble être un bon présage. Une traînée de fourmis noires est à ses pieds et par chance, elle s’est arrêtée, juste à la limite de l’autoroute créée de toutes pièces par ces travailleuses acharnées qui transportent des morceaux de feuilles sur le dos. Vu la grosseur de celles-ci et l’expérience qu’elle a vécue sur la plage, elle n’ose imaginer ce qui se serait passé si son pied avait barré la route à cette horde de besogneuses.

Elle continue son chemin en faisant un peu plus attention à l’endroit où elle met les pieds et elle entend de plus en plus clairement le bruit de l’eau qui fracasse les rochers.

         — Cascade ? Une cascade, et s’il y a une cascade, il y a forcément des hommes, se dit-elle naïvement.

         Elle augmente le rythme de ses pas et suit le sentier qui l’amène, vers ce qui lui semble être, la porte de son salut. Elle aboutit au plan d’eau. Une cascade d’une dizaine de mètres d’eau et une piscine naturelle de toute beauté se trouvent devant elle, mais elle a beau inspecter les lieux. Le chemin finit sa course ici. Pas de panneau, rien que cette magnifique cascade qu’elle aurait aimé apprécier à sa juste valeur, mais qui fait place à un sentiment de frustration énorme.

  • J’aurais dû partir à droite, je le savais, dit-elle en maugréant.

         Malgré sa désillusion, elle s’approche de l’eau qui lèche les rochers et tend les mains en formant une coupelle de fortune afin de recueillir cette boisson si précieuse. Elle fait ainsi des aller-retour et étanche sa soif avant de contempler une dernière fois le bassin transparent et le liquide qui s’abat invariablement sur les pierres.

         — Je rêve là, dit-elle, en fixant attentivement le centre du bassin.

         Elle scrute l’horizon et fait un tour sur elle-même. Non, personne ne la regarde et s’il y a quelqu’un, il est bien caché, se dit-elle. Elle se déchausse, enlève ses chaussettes, son jean et le tee-shirt à courte manche et les place sur un rocher en hauteur. La voici, presque nue, et elle envisage de tout retirer, mais sa pudeur naturelle l’en empêche. Elle rentre donc dans l’eau en sous-vêtements et se dirige vers le centre du bassin. Elle met la tête dans l’eau, malgré qu’elle déteste mouiller ses cheveux et attrape une corde qui, comme par magie, libère cinq gourdes prisonnières des flots.  

Elle les détaille une par une : grise, sans aucun signe distinctif, avec le bouchon blanc et le joint rouge foncé. Cinq gourdes qui lui rappellent le court laps de temps où elle était chez les Lutins. Une chose est quasi certaine : elles ne sont pas là depuis très longtemps ! Est-ce que cela a un rapport avec le billet qu’elle a trouvé hier ? Elle ne pourrait pas le jurer.

Elle s’approche de la cascade et remplit les cinq, mais lorsqu’elle sort de l’eau, elle réalise que c’est affreusement lourd et qu’elle ne pourra pas toutes les transporter. Elle a toujours l’espoir que le sentier de droite lui permettra de sortir de ce cauchemar. Elle décide donc d’accrocher une gourde de chaque côté de la corde, de passer ce nouveau collier autour de son cou et d’abandonner les trois autres récipients sur le rocher où se retrouvent encore ses vêtements. 

Elle enfile ses habits et reprend le chemin inverse. La corde est rugueuse et lui laboure la peau du cou. Elle la glisse sur son épaule, puis un quart d’heure plus tard, sur l’autre. En désespoir de cause, elle tente en vain de l’attacher à sa taille, mais les gourdes sont trop lourdes et à plusieurs reprises son jean qui n’était, déjà, pas très serrant lors de l’achat, tombe à ses pieds manquant de peu de la faire trébucher.

Elle aboutit en nage à son point de départ et soulage sa soif. Elle dépose la corde et les contenants sur le bord du sentier, en face de la maison, et elle prend à droite comme elle aurait dû le faire il y a plus de trois heures. Elle regarde le soleil. D’après sa position verticale et son ombre, elle déduit qu’il est à peu près midi. Pas de temps à perdre si elle ne veut pas passer une nuit de plus dans cette affreuse bicoque.

À plusieurs reprises, le chemin se divise et il faut choisir. Elle ne peut s’empêcher de penser au programme qui l’attendait si elle ne s’était pas retrouvée ici. Après la visite du Volcan Arenal, le guide devait l’emmener à son hôtel où elle pourrait à l’heure actuelle profiter des sources chaudes du Baldy en sirotant un cocktail.

Un cri incroyablement terrifiant la fit sursauter. Machette à la main, elle scrute les environs lorsque le son se répète. En haut d’un arbre, un singe hurleur la regarde en se grattant les puces. Sans aucun doute, vu les attributs masculins qui pendent, c’est le mâle qui l’invite à passer son chemin.

         — Décidément, les singes ne sont pas très accueillants ici, ne peut-elle s’empêcher de clamer sa constatation.

         Lorsqu’elle avait vu les quatre primates qu’on trouvait dans ce pays, elle était tout excitée d’entendre ce fameux cri qui, paraît-il, est plus puissant que le rugissement du lion. Ce bruit lui a donné la chair de poule et lui a glacé le sang. Dans d’autres circonstances, elle aurait admiré le singe au pelage noir, mais elle ne s’éternise pas et reprend son chemin.

Après plus de deux heures de marche, elle arrive à la fin du sentier. Un mur de quatre mètres de haut lui barre la route. Elle s’approche de la muraille, évalue sa hauteur et pose sa main sur celui-ci.

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